à cause de la faiblesse du naira, les multinationales de la Bourse de Lagos en difficulté

Plusieurs multinationales étrangères cotées sur la Bourse de Lagos sont frappées par les implications négatives de la perte de valeur du naira, la monnaie nigériane, et examinent actuellement des stratégies pour y faire face.

Nigerian Breweries, filiale du groupe néerlandais Heineken, a déclaré une perte de 106,3 milliards de nairas (92,27 millions $) pour l’année 2023, la première sur une période de 10 ans.

Malgré une augmentation de ses ventes de l’ordre de 8,9%, son résultat net final a été négativement impacté par une augmentation de ses charges en raison de l’inflation, mais aussi une progression de 449,7% de ses charges financières, en rapport avec ses engagements de remboursement de dette à l’international.

L’entreprise a déjà augmenté trois fois les prix de ses produits depuis le début de l’année et prévoit une augmentation de capital de 600 milliards de nairas pour renforcer ses fonds propres et faire face à ses engagements de court et moyen terme.

L’opérateur sud-africain de téléphonie MTN n’a pas échappé à ces conséquences. La contribution de sa filiale au Nigeria, qui est aussi la première en termes de marché, a reculé de près de 80%.

La filiale locale du groupe britannique Unilever a cessé de fabriquer localement ses produits d’entretien ménager et corporel, et le britannique PZ Cussons indique être sur le point de procéder à une restructuration qui pourrait lui coûter 1,5 milliard $.

Dès son arrivée au pouvoir en juin 2023, l’actuel président nigérian, Bola Tinubu, a mis en application son projet de campagne visant à réguler différemment la gestion des réserves de change, en soumettant son appréciation à la valeur nette du marché. Cela s’est traduit par une dévaluation de la monnaie et a mis en lumière la forte dépendance de l’industrie locale aux intrants étrangers.

A cette dépréciation de la monnaie s’ajoute une accélération de la hausse des prix, qui a atteint les 37%, alors que le produit intérieur brut (PIB), c’est-à-dire le flux de richesse créé dans le pays, lui, évolue à un rythme plus lent. Enfin, la population nigériane a continué de croître, atteignant les 211 millions de nationaux, selon des données de la base des connaissances d’Ecofin Pro.

Une augmentation de la population qui, combinée à une inflation accélérée et une progression très lente des revenus, a érodé le pouvoir d’achat au sein de la population.

A la Bourse de Lagos, les dynamiques sont celles d’un marché financier. Son principal indice est en hausse de 36,6% depuis le début de l’année, selon des données de la plateforme African-Markets, et c’est la meilleure performance africaine.

Mais pour ces multinationales, les performances sont moins positives. Nigerian Breweries a perdu 22% depuis le début de l’année 2024, et MTN Nigeria a reculé de 14% sur la même période. L’ampleur du défi reste à déterminer, notamment pour plusieurs de ces entreprises qui sont au Nigeria depuis des années et ont traversé plusieurs cycles économiques.

Selon une analyse des données collectées par l’Agence Ecofin, le chiffre d’affaires global a progressé de 34% en moyenne sur les trois dernières années à la Bourse de Lagos, et le bénéfice net a quant à lui évolué en moyenne de 23% par an.

La situation actuelle remet en cause l’argument selon lequel une monnaie faible rend un pays compétitif et attire davantage d’investisseurs étrangers. Dans ce cas présent, ces acteurs économiques sont inquiets et prévoient de réorganiser leur présence.