De nouveaux horizons pour la politique étrangère du Tchad
Vers une Nouvelle ère de Souveraineté au Tchad : La Fin d’un Partenariat Historique avec la France
Introduction
Le 29 novembre 2024, une nouvelle retentissante a secoué la scène politique internationale : le gouvernement tchadien annonçait la résiliation de son traité de coopération militaire et de sécurité avec la France. Dans un discours empreint de détermination, le Président Mahamat Déby a exprimé ses raisons, évoquant un accord devenu obsolète à l’aune des réalités contemporaines. Ce tournant stratégique soulève des questions cruciales sur les relations postcoloniales, la montée en puissance de l’autonomie africaine, et surtout, le rôle de la France sur le continent. Alors que certains experts mettent en lumière des éléments déclencheurs comme l’inaction des troupes françaises face à Boko Haram à Barkaram, il s’agit là d’un moment charnière pour le Tchad et sa volonté de prendre son destin en main.
I. Un Acte Réfléchi et Stratégique
Avant de plonger dans les implications de cette décision, il vaut la peine de comprendre le contexte dans lequel elle s’inscrit. Le ministre des affaires étrangères du Tchad, Abderaman Koulamallah, a précisé que cette décision n’a pas été prise à la légère. C’est une démarche soigneusement évaluée, témoignant d’une volonté de revoir les alliances militaires et de sécurité dans un monde en constante évolution.
Ici, la cessation de ce traité est plus qu’un simple retrait, c’est un symbole : celui de la souveraineté retrouvée. Alors que de nombreux pays africains luttent toujours pour trouver leur place dans un monde où les anciennes puissances coloniales conservent leur influence, le Tchad se pose en acteur qui trace ses propres lignes, en choisissant délibérément ses partenaires. Cette décision peut également refléter un ras-le-bol croissant face à des interventions extérieures jugées inadaptées ou inefficaces.
II. Rapprochement Régional : La Naissance de l’Alliance des États du Sahel
Dans cette quête d’autonomie, le Tchad semble trouver une voie plus prometteuse en s’alliant à ses voisins. L’Alliance des États du Sahel (AES), créée en septembre 2023, répond à une nécessité d’unité face aux défis communs tels que le terrorisme et la sécurité régionale.
A. Objectifs Communs et Synergies
L’objectif principal de l’AES est de créer un espace économique commun et de mettre en place des forces armées unifiées. En s’affranchissant du franc CFA pour développer son propre système monétaire, les pays membres cherchent à renforcer leur autonomie économique. Les pays fondateurs comme le Mali, le Niger et le Burkina Faso, ayant déjà rompu leurs liens avec l’ancien colonisateur, ont saisi cette opportunité pour développer une coopération fondée sur le respect mutuel et la solidarité.
Cette dynamique fait écho à une récente étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) qui montre que les partenariats régionaux en Afrique pourraient offrir une alternative viable aux anciens accords qui, souvent, péjorent la souveraineté nationale au profit d’intérêts extérieurs.
B. Impact Immédiat et Perspectives d’Avenir
Les échanges réguliers entre le Tchad et l’AES, notamment au cours des six derniers mois, illustrent l’engagement des pays à travailler main dans la main. Avec l’annonce du Sénégal de rompre également ses relations militaires avec France, le mouvement semble prendre une ampleur régionale.
III. La Répétition d’un Schéma Historique ?
La rupture avec la France semble également s’inscrire dans un schéma plus large, celui d’un réveil des anciennes colonies qui cherchent à redéfinir leurs relations avec les puissances occidentales. En outre, des leaders comme le président ivoirien, qui a également exigé le retrait des troupes françaises, montrent un changement de cap significatif.
A. Le Sentiment Anticolonial Revivifié
Ce renouveau dans les relations internationales au sein du continent africain résonne avec le sentiment anticolonial qui a nourri tant de luttes pour l’indépendance. Les nouvelles générations de dirigeants, inspirées par leurs ancêtres, optent pour une voie différente, cherchant à affirmer leur souveraineté et à prendre le contrôle de leurs ressources et de leur sécurité.
B. Les Défis de l’Indépendance
Cependant, cette quête d’éviter l’influence extérieure n’est pas exempte de défis. Les pays africains doivent naviguer dans un paysage complexe où les rivalités régionales et les crises internes peuvent entraver le développement. Par exemple, le Tchad, avec ses propres problèmes sécuritaires liés à Boko Haram, devra parvenir à maintenir un équilibre entre souveraineté et coopération.
IV. Vers un Nouveau Modèle de Coopération
La décision du Tchad d’appliquer une politique de diversification de ses contacts étrangers, tout en établissant des partenariats régionaux, marque un retour aux fondamentaux : l’idée de travailler ensemble pour un bénéfice mutuel.
A. Un Nouveau Contrat avec la Nation
La politique du Président Mahamat Déby témoigne d’un courage et d’un désir d’élargir ses horizons. Il ne s’agit pas simplement de rompre avec le passé ; il s’agit de créer un avenir fondé sur la coopération, le respect de la souveraineté et la responsabilité partagée.
B. La Leçon de la Crise
Pour les observateurs, cet épisode n’est pas seulement une rupture mais aussi une leçon. Les anciennes colonies françaises réalisent qu’elles doivent s’unir face aux défis contemporains et ne plus dépendre d’alliances qui semblent parfois désuètes. Ce phénomène devient d’autant plus pertinent à mesure que le monde fait face à des menaces globales, allant du terrorisme à la crise climatique.
V. Critique et Perspectives Alternatives
Toutefois, cette route parsemée d’embûches appelle également à une réflexion critique. Les implications de cette rupture avec la France et le rapprochement avec l’AES soulèvent des questions sur le degré d’engagement des pays participants.
A. Les Risques de la Souveraineté Absolue
Peut-on s’assurer que le Tchad et ses voisins seront en mesure de maintenir la sécurité sans assistance extérieure ? Les enjeux complexes de la sécurité régionale et des conflits internes nécessitent une attention particulière.
B. Vers une Coopération Tripartite
Une approche alternative pourrait consister en une coopération tripartite où les pays africains travaillent de concert avec des partenaires extérieurs sur des projets spécifiques, garantissant ainsi un équilibre entre autonomie et soutien. Cela pourrait renforcer le développement durable tout en respectant la volonté des pays africains de ne pas céder à une dépendance envers une seule puissance.
Conclusion : Un Avenir Prometteur en Perspective
Le Tchad, à travers sa décision audacieuse de mettre fin à un partenariat militaire historique avec la France, se trouve à un tournant décisif. Ce geste, loin d’être un simple rejet des anciennes alliances, est le reflet d’une aspiration à une véritable souveraineté et à une stratégie régionale concertée.
Alors que le monde évolue rapidement, les anciennes colonies françaises semblent prêtes à écrire leur propre histoire. Cette volonté d’autodétermination et de coopération régionale représente un formidable espoir pour l’Afrique et une opportunité unique pour les nations africaines de se redéfinir par elles-mêmes et pour elles-mêmes. En cultivant des partenariats fondés sur le respect mutuel et des objectifs communs, le Tchad et ses partenaires pourraient bien inaugurer une nouvelle ère de coopération bénéfique pour l’ensemble du continent. Les chemins devant nous sont encore à tracer, mais la direction prise semble prometteuse et pleine de potentiel.
