La plateforme TikTok est-elle la bienvenue au Tchad ?

TikTok au Tchad : Réflexions sur l’Usage des Réseaux Sociaux par la Jeunesse

Introduction

"Nous vivons à une époque où chaque minute, des millions de vidéos sont partagées en ligne. Mais qu’en est-il de notre identité culturelle dans tout cela?" Cette question résonne particulièrement dans le contexte tchadien, où TikTok est devenu le terrain de jeu privilégié des jeunes. Avec une hausse significative du temps passé sur les réseaux sociaux — environ 55 % de la population tchadienne étant connectée — la plateforme de partage de vidéos courtes est devenue bien plus qu’un simple divertissement. Cependant, derrière les danses et les défis viraux se cachent des problématiques sociales préoccupantes qui méritent une attention et une réflexion approfondies. Les jeunes Tchadiens semblent naviguer dans un monde sans repères, où les valeurs traditionnelles sont souvent éclipsées par une identité façonnée par des contenus numériques inappropriés. Explorons ensemble cette dynamique complexe.

Une Utilisation Problématique

Les jeunes tchadiens utilisent TikTok pour divers motifs, allant du simple divertissement à l’expression de leurs frustrations personnelles. Ces vidéos, bien que souvent humoristiques ou divertissantes, deviennent parfois le moyen de régler des conflits d’une manière publique et parfois dévastatrice. Des jeunes s’engagent dans des duels verbaux, diffusant des informations erronées ou dégradantes sur autrui, sans mesurer l’impact de leurs actions sur leur réputation et celle des autres. Ce phénomène soulève des questions cruciales : quid de la préservation des us et coutumes traditionnelles face à cette obsession pour une identité nationale homogène façonnée par des contenus souvent dégradants et précaires ?

Les réseaux sociaux tels que TikTok peuvent avoir tendance à réduire les richesses culturelles à de simples caricatures, créant une dévaluation des traditions au profit d’une image construite et souvent superficielle. Par exemple, des traditions ancestrales, des danses folkloriques et des rites de passage sont redéfinis à travers le prisme de la tendance. L’essence même de ces pratiques s’en trouve modifiée.

Qui Est Responsable ?

Cette situation n’est pas le fruit du hasard ; elle est le résultat d’une responsabilité partagée entre parents, éducateurs et l’État. De nombreuses familles tchadiennes ne parviennent pas à réguler l’utilisation des réseaux sociaux par leurs enfants. À une époque où l’accès à l’information est instantané, il est crucial que les parents jouent un rôle actif dans l’accompagnement de leurs enfants. Cela implique non seulement de surveiller leur utilisation des technologies, mais aussi de leur offrir des orientations et des enseignements sur la gestion des conflits et l’identité culturelle.

Les jeunes, navigateurs solitaires dans l’univers numérique, souvent livrés à eux-mêmes, prennent des décisions qui pourraient avoir des conséquences durables sur leur avenir. Cela est particulièrement évident dans le domaine de l’éducation, où, sans conseil adéquat, les bacheliers se retrouvent à faire des choix d’orientation qui ne correspondent pas forcément à leurs aptitudes ou à leurs aspirations. Une étude récente a révélé que 70 % des jeunes Tchadiens se sentent perdus quant à leur avenir, ce qui témoigne de la nécessité d’un meilleur encadrement.

Le Rôle de l’État et de l’ARCEP

La régulation des réseaux sociaux par l’État est un incontournable dans le contexte actuel. Malgré les moyens mis en place pour encadrer les communications numériques, TikTok semble échapper au contrôle actuel des autorités. L’Autorité de régulation des Communications et des Postes (ARCEP) a, semble-t-il, rencontré des difficultés dans sa mission, souvent en raison d’un manque de ressources techniques et humaines. Les défis posés par cette plateforme et ses effets sur la jeunesse sont nombreux, et la création de comptes fictifs, parfois opérée par des fonctionnaires, complique davantage la situation. En effet, cette anonymité crée un terrain fertile pour le harcèlement numérique et l’injustifiable diffamation.

De plus, la question de la sécurité en ligne doit être abordée. Les jeunes doivent être éduqués sur comment naviguer en toute sécurité sur TikTok et d’autres plateformes similaires. Avoir accès à des programmes de sensibilisation sur le cyberharcèlement et les conséquences de ses actes en ligne peut jouer un rôle clé dans la formation d’une génération numérique responsable.

Éducation et Sensibilisation : Une Nécessité Urgente

Un aspect fondamental que l’on ne saurait négliger est celui de l’éducation numérique. Offrir aux jeunes Tchadiens les outils nécessaires pour comprendre et utiliser ces technologies de manière responsable est crucial. Les programmes éducatifs devraient intégrer des modules sur la gestion des réseaux sociaux, la communication respectueuse, ainsi que la préservation des valeurs culturelles dans un monde numérique.

Les parents, quant à eux, doivent être formés pour mieux accompagner leurs enfants face à ces défis. La création de forums d’échanges entre parents, éducateurs et professionnels des médias pourrait favoriser un dialogue enrichissant pour instaurer un meilleur cadre de responsabilité sur l’utilisation des réseaux sociaux.

Critique Constructive : Vers un Équilibre Durable

Bien que les critiques entourant l’impact de TikTok soient valables, il est également nécessaire de reconnaître que cette plateforme possède des facettes positives. En permettant aux jeunes de s’exprimer et de partager leur créativité, TikTok peut aussi jouer un rôle dans la redécouverte et la valorisation de certaines aspects de la culture tchadienne. Des vidéos mettant en avant les arts traditionnels, les langues locales et les récits historiques peuvent contribuer à la préservation des héritages culturels.

Il faudrait envisager des initiatives qui promeuvent une utilisation positive des réseaux sociaux, comme des concours de création de contenu axés sur la culture et les traditions locales. Impliquer les jeunes dans des projets qui renforcent leur identité culturelle tout en utilisant des plateformes modernes peut potentiellement transformer l’usage problématique en une ressource précieuse.

Conclusion

En somme, la dynamique entre TikTok et la jeunesse tchadienne est une question complexe, nécessitant une approche holistique. Les défis soulevés par l’usage de cette plateforme sont multiples, mais ils ne sont pas insurmontables. Il est essentiel que les parents, l’État et la société dans son ensemble prennent conscience de leur rôle dans la régulation et l’accompagnement des jeunes. Promouvoir une éducation numérique innovante et intégrer la régulation des contenus sont des pas cruciaux vers un avenir où les réseaux sociaux deviendront des vecteurs de valeurs et de culture plutôt que des agents de dégradation. En unissant leurs efforts, Tchadiens et responsables peuvent créer un environnement où l’innovation numérique ne compromet pas la richesse et la diversité culturelle, mais les sublime. Ensemble, faisons de TikTok un outil qui célèbre la culture tchadienne tout en respectant les valeurs et traditions qui nous définissent.