La Filière Cacao-Café au Cameroun : Vers un Avenir Plus Transparent et Durable

Introduction

Au cœur du Cameroun, là où la terre fertile rencontre une passion séculaire pour le cacao et le café, se dessine une nouvelle ère pour ces deux filières emblématiques. « Nous avons le chocolat le meilleur du monde, mais il est temps que cela se traduise aussi dans notre manière de fonctionner », pourrait dire un producteur engagé. Cette déclaration résonne avec la clôture, le 29 août dernier, de la 32ème session ordinaire de l’Assemblée générale du Conseil Interprofessionnel du Cacao et du Café (CICC) à Yaoundé, dirigée par Luc Magloire Mbarga Atangana, le ministre du Commerce. Cette rencontre a mis en exergue non seulement les succès, mais également les défis pressants auxquels sont confrontés ces secteurs. À travers une évaluation rigoureuse, les acteurs de la filière sont appelés à prendre conscience des enjeux qui se posent à eux, surtout dans un contexte mondial de plus en plus exigeant sur la durabilité et la traçabilité.

Un Tournant Décisif pour le Cacao Camerounais

État des Lieux des Filières Cacao et Café

C’est au sein de l’assemblée que Luc Magloire Mbarga Atangana a souligné les avancées récentes du Cameroun en matière de qualité de cacao, un produit désormais distingué sur la scène internationale. Avec des exportations en pleine croissance, le pays se positionne comme un acteur majeur sur le marché mondial. Cependant, ce succès cache des réalités plus sombres qu’il est urgent d’affronter.

Les Défis de la Transparent

Lors de cette session, le ministre a mis en lumière des problématiques épineuses, notamment celle des pratiques frauduleuses qui gangrènent la filière. Il s’est exclamé sur les chiffres d’exportation vers le Nigeria, dévoilant un écart frappant : seulement 700 tonnes déclarées contre 70 000 tonnes réelles. Ce constat soulève des questions préoccupantes sur l’ampleur du commerce informel qui, non seulement menace l’intégrité des transactions, mais nuit également à la réputation de tout un secteur.

Un Commerce Informel en Croissance

De telles disparités illustrent la nécessité d’une réforme méthodique au sein de la filière. Le commerce informel peut sembler une voie de moindre résistance pour certains acteurs, mais il engendre des conséquences néfastes. Non seulement il érode les marges bénéficiaires des producteurs, mais il affaiblit aussi la position concurrentielle du Cameroun sur le marché international. Ce constat appelle à une réflexion profonde sur le renforcement des structures existantes pour garantir la transparence des transactions.

Une Réflexion Nécessaire sur la Rémunération des Producteurs

Le Prix à l’Export : Un Défi Crucial

Dans ce contexte, Luc Magloire Mbarga Atangana a lancé un appel fort concernant la rémunération des producteurs et les prix à l’exportation. La question de la juste rémunération est cruciale pour encourager les pratiques durables et équitables. Les producteurs doivent voir leurs efforts récompensés afin de maintenir des standards de qualité qui profitent à toutes les parties prenantes.

Le Contexte des Exigences Internationales

Cette réflexion intervient à un moment charnière pour l’industrie, alors que l’entrée en vigueur du Règlement européen sur la déforestation importée se profile à l’horizon, avec les premiers effets attendus dès le 30 décembre 2024. Ce règlement impose aux acteurs de la filière de s’engager sur la traçabilité de leurs produits, ce qui représente un défi, mais aussi une opportunité de revalorisation pour le cacao et le café camerounais.

La Filière au Croisement des Chemins : Défis et Opportunités

Consolidation versus Durabilité

La dualité des enjeux auxquels fait face la filière cacao-café au Cameroun est illuminée par le discours du ministre. D’une part, il s’agit de consolider l’image du Cameroun comme producteur de cacao de qualité, fruit d’efforts soutenus. D’autre part, les acteurs doivent naviguer des défis internes, tels que les disparités économiques et la nécessité d’une approche durable face à la pression internationale croissante.

La Durabilité : Un Impératif Éthique

La durabilité ne se limite pas à une question de réglementation ; elle devient une exigence éthique. Les producteurs, les transformateurs, et même les consommateurs doivent s’aligner vers un modèle respectueux de l’environnement. Cela implique une transition vers des pratiques agricoles durables, une meilleure gestion des ressources, et un respect strict des normes de traçabilité.

L’Appel à l’Unité

L’appel à l’unité du ministre ne doit pas être pris à la légère. Dans un paysage commercial globalisé et compétitif, la solidarité entre les acteurs est essentielle. "Avançons ensemble", a-t-il répété, mettant l’accent sur l’interdépendance entre producteurs et marchés. Dans une telle dynamique, les acteurs s’encouragent mutuellement à adopter des pratiques vertueuses, à partager des connaissances, et à collaborer sur de nouvelles stratégies de développement.

L’Accord de Mutualisation : Vers une Meilleure Traçabilité

La Signature de l’Accord de Mutualisation

En parallèle aux discussions de l’assemblée, une avancée majeure a été réalisée avec la signature le 28 août d’un Accord de mutualisation des données de géolocalisation des parcelles cacaoyères et caféières. Ce projet, qui a bénéficié de la présence de Gabriel Mbaïrobe, ministre de l’Agriculture et du Développement rural, ainsi que de Jean-Marc, ambassadeur et chef de la délégation de l’Union Européenne au Cameroun, marque une étape significative vers une meilleure coordination et transparence dans les pratiques de production.

Importance de la Géolocalisation

Cette initiative n’est pas simplement administrative ; elle est cruciale pour garantir que chaque produit mis sur le marché respecte les normes liées à la durabilité. La géolocalisation des parcelles permet non seulement de prouver la provenance des produits, mais également d’assurer une traçabilité rigoureuse, ainsi que d’identifier et de remédier aux éventuelles défaillances dans le processus de production.

Critique Constructive : Vers une Filière Résiliente

Évaluation des Stratégies Actuelles

Bien que des progrès significatifs aient été réalisés, il est impératif d’examiner les stratégies actuelles de la filière cacao-café au Cameroun sous un angle critique. Le ministre du Commerce a mis en avant les lacunes persistantes en matière de communication entre les différents acteurs de la filière. Une meilleure synergie serait bénéfique pour harmoniser les efforts en matière de durabilité, traçabilité et rémunération équitable des producteurs.

Solutions Proposées

1. Éducation et Sensibilisation : Mettre en place des programmes de formation pour éduquer les producteurs sur les pratiques durables et leur importance pour l’avenir du secteur.

2. Renforcement des Institutions : La création ou le renforcement d’institutions indépendantes pour contrôler et certifier la qualité pourrait rassurer les marchés internationaux sur la provenance des produits.

3. Stratégies de Commercialisation : Élaborer des stratégies de commercialisation plus transparentes qui intègrent des canaux de distribution formels pour mieux valoriser le cacao et le café camerounais.

Conclusion

La filière cacao-café du Cameroun se trouve à un tournant, plusieurs routes s’offrent à elle. Les défis sont nombreux, mais le potentiel pour une transformation réussie est bien réel. Alors que les acteurs du secteur se rassemblent autour de valeurs de transparence et de solidarité, il est impératif de garder en tête que seul un engagement collectif et déterminé pourra propulser le Cameroun au sommet de l’industrie mondiale du cacao.

À la lumière des récents développements, notamment le nouvel Accord de mutualisation et l’interdiction imminente de la déforestation, toutes les parties prenantes doivent regarder vers l’avenir et s’engager sur un chemin durable et éthique. Seul un secteur uni, transparent et proactif pourra assurer que le Cameroun non seulement maintienne, mais renforce sa place dans le concert des nations producteurs de cacao. En agissant dès maintenant, le pays a l’opportunité de transformer chaque grain de cacao en une promesse d’avenir tout en préservant la beauté et la richesse de ses terres pour les générations futures.